La demi-décade 2018-2023 est certainement l’une des périodes les plus chargées en crises multiples et variées, s’emboîtant les unes dans les autres, à la manière des poupées russes, depuis les « gilets jaunes » jusqu’à l’Ukraine en passant par le Covid.
Et toutes ces crises ont de graves répercussions, humaines, économiques et financières.

 

Il y a 4 ans, en novembre 2018, éclatait une crise aussi originale qu’inattendue,
celle des « gilets jaunes». Tout au long de cette crise qui se répétait de samedi en samedi, et parfois violemment, la nation stupéfaite découvrait une population pauvre, oubliée, voire méprisée par la France d’en haut et les pouvoirs publics.

Puis, en 2020, tout aussi inattendue, survint la crise du Covid, avec un confinement inédit restreignant les déplacements dans le temps et dans l’espace ; le masque considéré d’abord comme inutile devenait obligatoire, et à l’exception des commerces déclarés essentiels, toute activité était réduite à sa plus simple expression.

Survint ensuite une deuxième vague d’épidémie où heureusement l’on tira la leçon des erreurs et des excès commis lors de la première.

Enfin, le 25 février dernier, nouvelle crise lorsque la Russie envahit soudainement l’Ukraine avec toutes ses conséquences : humaines, mais aussi économiques, financières et énergétiques.

Si gouverner, c’est prévoir, il faudrait être de mauvaise foi pour reprocher au gouvernement de ne pas avoir pu les anticiper ou les prévenir. Quoique…

Concernant les gilets jaunes, le gouvernement n’avait pas pris en compte l’importance de la voiture (surtout diesel) en province, ni la paupérisation d’une partie de la population vivant à un euro près, bien oubliée des pouvoirs publics contrairement aux bénéficiaires de la politique de la ville et des subventions aux « quartiers ».

Concernant le Covid, il faut rendre hommage à l’ancienne ministre de la santé, Roselyne Bachelot, d’avoir constitué un stock de masques dénoncé et brocardé alors par la presse ce qui n’a pas favorisé leur reconstitution. Quant au premier ministre en poste à l’époque, il fait aujourd’hui l’objet d’une enquête de la Haute Cour de justice concernant son suivi de la crise.

Pour le contribuable, c’est le suivi financier qui s’avère préoccupant. Certes, il était indispensable de mettre sous perfusion les secteurs paralysés par un confinement parfois abusif, mais on aurait pu faire l’économie de la fermeture d’activités prétendument non essentielles.

Car indépendamment de tous les milliards accordés en vertu du quoi qu’il en coûte dû à la pandémie et de 50 autres milliards dus aux mesures de soutien en 2022, les contribuables ont pu découvrir de curieuses dépenses comme le recours aux cabinets de consultants pour des montants colossaux, aveu d’une carence des ministères et autres agences gouvernementales, incapables de traiter les problèmes dont ils ont la charge.

Les cabinets de consultants pour le Covid auraient touché quelques dizaines de millions d’euros. Des corrections ont été faites depuis, mais au premier semestre les cabinets de consultants ont encore touché plus de 100 millions d’euros selon La Lettre A.

Autre dérive dont l’épidémie a été révélatrice : le recours massif à la publicité, fort coûteuse également.

S’il était louable d’informer les citoyens sur des mesures sanitaires, on peut s’interroger sur la pléthore de messages dans la presse et à la télévision qui prennent parfois leurs destinataires pour des demeurés concernant des sujets aussi divers que l’hygiène, la santé, l’alimentation ; tout y passe et même la promotion du cinéma !

Concernant l’Ukraine, il était évident que des sanctions allaient amener des mesures de rétorsion. Espérons maintenant que les pouvoirs publics réfléchiront à deux fois avant de se lancer dans une spirale infernale, triste illustration de l’arroseur arrosé.

Crises : suite, mais pas fin

La crise énergétique où la guerre en Ukraine a bon dos, car si la France manque d’électricité et s’apprête à subir un confinement climatique et à grelotter, c’est d’abord à cause de la fermeture de Fessenheim et de la déshérence de la politique nucléaire, heureusement rectifiée depuis, mais trop tard.

L’augmentation du prix des carburants et surtout celle de l’électricité porte un rude coup à l’économie : usines, centres d’activité, commerces, transports et simples particuliers…

Tous les agents économiques vont en ressentir les effets, cette crise énergétique se transformant en crise économique et financière.

La crise économique touche toutes les activités utilisatrices d’énergie, sensibles au prix de l’électricité et prises entre la tenaille de réduire, voire d’arrêter leur activité ou d’augmenter leur tarif, alimentant ainsi une inflation qui atteindra des pics jamais vus depuis longtemps.

Elle est déjà de 6 % en moyenne et bien plus élevée pour l’alimentation et l’énergie tout en étant plus ou moins compensée par des aides et autres boucliers.

Et cette crise économique bien réelle risque de déboucher sur une crise financière.

La crise financière due notamment au quoi qu’il en coûte a un prix qui se voit dans le niveau d’endettement et dans le niveau de fiscalité, la France détenant des records en matière de prélèvements fiscaux à égalité avec le Danemark, d’endettement et de déficits extérieurs.

Au quotidien, cette crise financière se manifeste par une forte inflation c’est-à-dire la hausse des prix à la consommation, mais aussi la hausse du prix de l’argent représenté par le taux d’intérêt.

Or, pour combattre l’inflation la BCE augmente les taux d’intérêt avec de lourdes conséquences : pour les particuliers emprunteurs comme pour les entreprises, le coût du crédit devient plus lourd et, pour l’État, le poids de la dette encore plus coûteux, sans parler du risque calculé d’une éventuelle récession.

De plus, avec une Allemagne décomplexée, il y a un risque certain de rupture entre les tenants de la rigueur que sont les pays du nord et ceux du « Club Med », accusés de laxisme budgétaire et donc de menacer l’euro, ce qui amènerait la France à être traitée comme le furent la Grèce et l’Italie, avec à la clé à une crise politique européenne.

 

C’était mieux avant ?

Cela dépend quand et où. Au plan sanitaire, la grippe espagnole de 1918 était nettement plus sévère que celle du Covid, et la crise de 1929, autrement plus désastreuse que celle des subprimes de 2008 pour ne pas parler des deux guerres mondiales.

C’est plutôt en termes civilisationnels, de sécurité ou de violences civiles que l’on peut regretter le bon vieux temps.

Fin octobre, témoin du pessimisme ambiant, l’indice de confiance des consommateurs affichait un plus bas historique face à toutes ces crises ; mais pourquoi ne pas envisager une possible remontée si toutes ou certaines de ces crises venaient à se dénouer ?