Situé en Sologne blésoise, le château de Cheverny est le 2e monument historique le plus fréquenté du département du Loir-et-Cher, juste derrière le château de Chambord. Détenu depuis plus de 650 ans par les Hurault, ce domaine réputé échappa deux fois à cette famille de financiers et d’officiers s’étant illustrés au service de plusieurs roi de France.

 

L’ancienne forteresse disparue

Depuis la seconde moitié du XIVe siècle, le domaine de Cheverny appartient à Jean Hurault, descendant d’une vieille famille blésoise déjà connue sous le règne de Philippe III le Hardi. En 1490, Jacques Hurault, petit-fils de Jean, sire de Vibraye et baron d’Huriel, acquiert la seigneurie de la Grange et de Cheverny.

Devenu gouverneur du comté de Blois sous François Ier, il procède à des agrandissements de son domaine. C’est son fils, Raoul Hurault, qui obtient du roi en 1510, l’autorisation de fortifier la demeure qu’il avait pu édifier pour accueillir les passages de la cour en Sologne.

Au décès de Raoul Hurault, tué devant Naples et, par ailleurs, ayant été entraîné dans des affaires financières douteuses, sa veuve Marie de Beaune se trouve contrainte d’aliéner le château de Cheverny. C’est ainsi qu’en 1551, Diane de Poitiers, en fit l’acquisition pour aller superviser ses travaux d’aménagement du château de Chaumont-sur-Loire, qu’elle avait échangé contre celui de Chenonceau.

Mais la favorite du roi Henri II sera contrainte de le restituer en 1564 à Marie de Beaune dont le défunt mari sera finalement réhabilité par le roi. Leur fils, Philippe Hurault, devient le seigneur de Cheverny dont les terres sont érigées en vicomté en 1577, puis en comté en 1582. Courtisan de Catherine de Médicis et d’Henri II, Philippe Hurault devient garde des Sceaux et remplace le cardinal René de Birague en tant que chancelier de France.

En 1596, il cède le domaine de Cheverny à son fils Henri Hurault qui, en janvier 1602, empoisonnera sa femme, Françoise Chabot, pour la punir de son infidélité. Apprenant cette tragédie, le roi Henri IV condamne le comte de Cheverny à demeurer sur ses terres.

Le château actuel

Deux années plus tard, Henri Hurault se remarie avec Marie Gaillard de la Morinière,
et quelques années plus tard, le comte de Cheverny sera rappelé au service du roi.
Le couple décide alors conjointement de faire table rase du passé, et fait procéder à la destruction complète de l’ancienne forteresse, dont quelques vestiges subsistent encore dans les communs.

Entre 1624 et 1640, une grande demeure de plaisance confortable correspondant au style et aux fastes de cette époque sera érigée à la place de l’ancienne demeure. Pour embellir leur nouveau château, les Hurault font appel à des artistes renommés dans la région comme l’architecte Jacques Bougier (dit Boyer) qui travailla également à Blois et à Chambord.

Construit dans un style classique en pierre de Bourré, un tuffeau provenant de la vallée
du Cher qui a la particularité de durcir et de blanchir avec l’âge, donnant notamment une blancheur éclatante à la façade sud, le château de Cheverny est nettement inspiré
du palais du Luxembourg à Paris. La décoration intérieure a été confiée à Jean Monier,
un artiste blésois talentueux qui avait été repéré et soutenu par la reine Marie de Médicis.

Mais le couple Hurault n’aura pas le loisir de voir l’achèvement des travaux, et c’est leur fille Elisabeth, marquise de Montglas, qui achèvera la somptueuse décoration intérieure après avoir racheté la part de sa sœur Anne-Marguerite.

Le château sert alors de cadre à de nombreuses fêtes fastueuses où la Grande Mademoiselle, fille de Gaston d’Orléans, séjournait régulièrement et qu’elle nommait
un « palais enchanté ».

Mais les héritiers de la fille du constructeur se désintéressent peu à peu de leur domaine
et durant les 150 années suivantes, Cheverny changera maintes fois de propriétaires.

En 1764, il passe entre les mains de Jean-Nicolas Dufort de Cheverny, introducteur des ambassadeurs, qui parvient à protéger son château pendant la Révolution française.

Après avoir été la propriété des banquiers Germain, Cheverny est racheté au début
du Premier Empire par Julien Guillot qui, en 1825, le cède en viager à Anne-Victor-Denis Hurault, 7e marquis de Vibraye, rapportant ainsi l’ensemble du domaine dans la famille
de ses ancêtres.

Dès sa prise de possession de la propriété, il fit combler les douves au sud et abattre des communs trop vétustes. Depuis cette date, le château de Cheverny s’est toujours transmis en ligne directe.

L’époque moderne

Dans les années 1850, de gros travaux de maçonnerie et de poutraison ont été engagés pour consolider et préserver l’ensemble de l’édifice. En 1922, le marquis Philippe de Vibraye décide l’ouverture du château au public et professionnalise déjà l’exploitation
de ce domaine de 2 100 hectares dont 1 850 hectares de bois.

Lors de la Seconde Guerre mondiale, Cheverny a servi d’entrepôt pour abriter diverses collections d’œuvres d’art provenant du Louvre.

Dans les années 60, la création de jardins et diverses animations dans le parc, comme la présence d’un ballon captif, contribuent à atteindre une rentabilité pérenne. Entre 1962
et 1965, les principales toitures avec leurs dômes sont refaites et la dernière partie est achevée en 1969.

Depuis 1994, la destinée de Cheverny est entre les mains de Charles-Antoine de Vibraye qui s’était préparé de longue date à ce passage de témoin de la part de son père et il innove à son tour en ouvrant immédiatement à la visite les appartements privés ainsi que la chapelle.

Le château, qui a inspiré Hergé pour dessiner le château de Moulinsart, attirait avant la pandémie du Covid-19, jusqu’à 350 000 visiteurs très francophones par an.

Pour gérer un tel domaine, Charles-Antoine et sa femme Constance, emploient 47 personnes à plein temps, affectées à des tâches bien spécifiques : sept sont chargées des jardins, quatre de la forêt, cinq de la billetterie, trois des chevaux et de la meute de chiens (Cheverny est un haut lieu de vénerie), six au magasin, quatre à l’administration, deux à l’exposition Tintin, le reste étant réparti entre le salon de thé situé dans l’orangerie et l’entretien général.

À cela vient s’ajouter régulièrement le renfort d’une quinzaine de saisonniers. Selon Charles-Antoine de Vibraye, « le budget de fonctionnement s’élève au strict minimum
à 85 000 euros par mois quoiqu’il arrive ».

Des travaux sont toujours en cours dans l’espace réservé à l’exposition de Tintin, et la restauration de la façade nord de style Louis XIII avec un enduit pelliculaire vient d’être achevée pour un montant de 450 000 euros, autofinancé à 50 %, subventionné à 30 % et complété par un crédit à 20 %.

Le château de Cheverny avait été classé en 1840, et déclassé en 1888, puis a fait l’objet d’une inscription en 1926 et en 2008. Depuis juin 2010, la totalité du château, les façades, l’orangerie ainsi qu’une grande partie du parc sont classés au titre des monuments historiques.

Pour l’instant, Charles-Antoine de Vibraye n’envisage pas de lancer de gros travaux du fait des incertitudes économiques, car il a pleinement conscience de l’environnement fragile de son domaine, nécessitant une gestion rigoureuse de chaque instant, où l’organisation des visites peut varier fortement en fonctions des aléas climatiques.

Les enfants du couple de Vibraye, tout en terminant leurs études, s’impliquent déjà dans
ce magnifique château que Charles-Antoine veille à préserver pour partager ce splendide patrimoine historique et culturel avec le plus grand nombre. Pour cela, son maître-mot est, avant tout,  de « conserver l’authenticité des lieux et toutes les traditions liées à la richesse de son histoire ».

 


POUR EN SAVOIR PLUS :

Château de Cheverny
1 rue du Château
41 700 Cheverny
Tél. : 02 54 79 96 29
Site : www.chateau-cheverny.fr
Prix : de 13,50 € à 23 € (selon parcours)


 

PLAN D’ACCÈS :