Maître Julien Pauchet, Notaire. © Mathias Paltrié

L’incidence fiscale de la transmission de patrimoine est un élément important à prendre en compte en fonction de ses objectifs patrimoniaux et qui, constamment, revient dans l’actualité parlementaire et budgétaire lorsqu’il s’agit, pour certains, de trouver un prétexte pour surtaxer toute forme de transmission.

 

Il est possible de commencer à transmettre son patrimoine à ses proches de différentes manières et notamment :
◗ en leur donnant un bien,
◗ en achetant un bien avec eux,
◗ en leur donnant de l’argent (suite à la vente d’un bien par exemple).

 

Pour chacune de ces possibilités, nous vous proposons une technique d’optimisation fiscale

1 – La donation d’un bien avec réserve d’usufruit
Le droit de propriété peut être démembré, c’est-à-dire divisé entre l’usufruit et la
nue-propriété, qui sont alors détenus par des personnes différentes : l’usufruitier
a la jouissance du bien (il peut l’utiliser ou toucher les loyers) ; le nu-propriétaire
a quant à lui vocation à devenir propriétaire du bien à l’extinction de l’usufruit.

En effet, le démembrement prend fin au décès de l’usufruitier.

On dit que la pleine propriété se reconstitue entre les mains du nu-propriétaire.

Les droits démembrés sont indépendants l’un de l’autre, mais ni l’usufruitier,
ni le nu-propriétaire, ne peuvent procéder seuls à la vente du bien.

Un parent pourra, par exemple, donner à un enfant la nue-propriété d’un bien, tout en se réservant l’usufruit, pour y vivre ou le louer.
◗ Donner la nue-propriété à ses enfants permet ainsi de réduire les droits de succession.

Tout d’abord parce que les droits de donation seront calculés uniquement sur la valeur
de la nue-propriété. Ensuite parce qu’au décès de leur parent, ils deviendront pleinement propriétaire du bien sans avoir à régler de droits sur la valeur de l’usufruit reçu ;
et ce même si le bien a pris de la valeur suite à la donation.

2 – L’acquisition d’un bien avec ses enfants en démembrement de propriété
(le démembrement ab initio)

Dans ce cas, les parents ne vont pas acheter le bien pour en donner ensuite la
nue-propriété à leurs enfants, mais ils vont se porter acquéreurs de l’usufruit du bien
et les enfants achèteront, dans le même acte, la nue-propriété de ce bien.

À cet effet, si les enfants ne disposent pas eux-mêmes des sommes propres nécessaires au financement de leur quote-part, une donation de somme d’argent sera consentie par les parents au profit de leurs enfants, afin que ces derniers disposent des liquidités nécessaires pour l’acquisition de la nue-propriété.
◗ Le démembrement ab initio est avantageux à un double titre.

En cas de donation, l’évaluation de l’usufruit, et donc de la nue-propriété,
sera obligatoirement effectuée sur la base du barème prévu par l’article 669
du Code général des impôts. Ce barème ne tient pas compte du taux de rentabilité du bien ou de l’espérance de vie différente d’un homme ou d’une femme.

Cette évaluation sera donc décorrélée de la réalité économique, ce qui entraînera une
surévaluation de la nue-propriété.

En revanche, en cas d’acquisition ab initio en démembrement, il sera possible de valoriser économiquement le démembrement en prenant en compte l’espérance de vie
de l’usufruitier, les revenus nets et le taux de rendement du bien (valeur actualisée du flux de revenus futurs), ce qui permettra donc de diminuer l’assiette d’imposition de l’opération.

Il conviendra toutefois de ne pas négliger la présomption de l’article 751 du Code général des Impôts et d’être en mesure d’apporter la preuve de la sincérité du démembrement de propriété.

En outre, une donation de somme d’argent (plutôt que celle d’un bien immobilier) permet de bénéficier, dans certaines hypothèses, d’un abattement supplémentaire.

Il est en effet possible de donner 31 865 € sur une période de quinze ans par un même donateur à un même bénéficiaire (article 790 G du CGI).
◗ Certaines conditions doivent être respectées pour bééficier de cette exonération  :
– le donateur doit, au jour de la transmission, être âgé de moins de 80 ans ;
– le bénéficiaire doit être majeur, c’est-à-dire avoir au moins 18 ans au jour de la transmission ;
– ce don doit impérativement être déclaré dans le mois qui suit la date du don.

3 – La purge des plus-values latentes (donner avant de céder)
Si l’on a le projet de donner de l’argent à ses proches et celui de vendre un bien immobilier ou des titres de société, il est important de s’interroger sur la chronologie des opérations.
En général, on vend le bien et on donne de l’argent ensuite.

En procédant de cette manière, on est imposé deux fois : à l’impôt sur la plus-value lors de la vente (sauf exception) et à l’impôt sur les donations lors de la donation.

Inverser les opérations (donner avant de céder) permettra de réduire la fiscalité de celui qui donne, ce qui permettra de donner davantage.

Le donateur sera imposé aux droits de donation lors de la donation (comme précédemment), mais lorsque le donataire (celui qui reçoit) vendra le bien,
aucune plus-value ne sera taxable.

En effet, la plus-value se calcule par la différence entre la valeur du bien au jour de la donation et sa valeur d’acquisition par le donateur et l’on aura pris soin de valoriser les biens lors de la donation au prix de revente.

Cette technique se prête donc particulièrement bien à la situation de clients possédant des actifs dont la valeur a fortement augmenté (forte plus-value latente) et désireux de transmettre une quote-part de leur patrimoine. Ainsi, la donation gomme la plus-value.

Votre notaire est là pour vous conseiller au mieux, selon votre situation particulière.

Par Maître Julien Pauchet, Notaire