À l’époque médiévale, un manoir fortifié s’élevait sur le site du fief du Taillis situé au Hameau Saint-Paul dépendant de la commune de Duclair en Seine-Maritime. Sa situation géographique en bordure de Seine, à proximité de Rouen et du Havre, l’a placé au cœur des terribles combats ayant opposé les forces anglo-canadiennes et allemandes durant l’été 1944.

En 1484, Robert Destin, vicomte et chapitre de Notre-Dame de Rouen chargé à l’époque de surveiller la construction du Palais de Justice de Rouen, devient propriétaire du fief du Taillis. En 1518, Jean Lasnel fait l’acquisition des terres du hameau Saint-Paul et devient en 1521 seigneur du Taillis. En 1532, Richard du Fay, grand vicaire de Georges 1er d’Amboise, cardinal et premier ministre de Louis XII, détient le fief du Taillis et se fait appeler Richard III du Fay du Taillis.

Ne conservant que la grande cave voûtée de l’ancien manoir, la construction du château débuta dans la première moitié du XVIème siècle. Bâti en pierre de Saint-Leu acheminée par bateau sur la Seine, il est le seul exemple de Seconde Renaissance italienne en Seine-Maritime.

Au décès de Richard en 1543, les travaux sont loin d’être achevés. En 1573, la propriété est dévolue à Jehan du Fay, bailli de Rouen et député aux États de Normandie. Jehan II du Fay meurt en 1615, son fils Jacques 1er du Fay du Taillis entreprend alors la construction des deux pavillons de style Louis XIII, de chaque côté du château, en 1623.

Dans la seconde moitié du XVIIème siècle, Jehan III, héritier de la seigneurie, ajoute un nouveau pavillon et raccroche son château à un ancien bâtiment isolé qui deviendra la « maison du Chapelain ».

Sur la façade du château, a été sculptée par la famille du Fay, une série de 12 blasons représentant les mariages de la famille du XVème au XVIIème siècle dont l’un d’entre eux reprend la devise de la famille : « Faites bien et laissez dire ».

Au cours du XVIIIème siècle, Claude Bernard du Fay devient propriétaire du domaine du Taillis, de 1750 à 1789. Deux ailes supplémentaires en briques jaunes sont ajoutées en reprenant les dimensions exactes des pavillons du XVIIème pour maintenir la symétrie.

Durant ces travaux, l’ancien escalier central est démonté et un grand escalier de style Louis XIII est construit sur la façade arrière. L’intérieur du château est transformé peu à peu pour le rendre plus confortable avec des lambris et des décorations Louis XVI qui vont habiller les salons.

La chapelle du XVIIème consacrée à saint Laurent, située dans un des pavillons, est transformée en théâtre avec un décor en trompe-l’œil.

Le dernier membre de la famille du Fay, Bernard, en fit don à son arrière neveu, Ferdinand, en 1777. À son décès, celui-ci ne laissa qu’une fille mineure, et le château du Taillis fut vendu sur adjudication à Monsieur Quevremont en 1807 qui entreprendra des fouilles archéologiques, exhumant notamment une ancienne léproserie située à proximité du château. Le domaine du Taillis se transmettra ensuite par les femmes pendant plusieurs générations.

Dans les années 1930, les propriétaires de l’époque, la famille Lenepveu-Bordes, entreprennent de nombreux travaux et font l’acquisition de boiseries cérusées exceptionnelles d’époque Régence, représentant les quatre saisons, qu’ils installeront au premier étage du théâtre.
Ces décors provenaient d’un hôtel particulier de Rouen, l’hôtel Bigot de Sommesnil, propriété du maire de Rouen au XVIIIème.

 

La famille Bordes étaient ultra conservatrice et vivait comme au XIXème siècle, sans électricité, sans eau courante, sans un minimum de confort, mais aussi sans l’aide d’un nombreux personnel indispensable pour entretenir une telle propriété s’étendant sur 150 hectares. Au décès de Monsieur Bordes en 1948, le château devient une coquille vide qui se dégrade rapidement.

Après le décès de Madame Bordes, les nombreux héritiers se disputent l’héritage mais se désintéressent du château. Ils le laissent totalement à l’abandon après avoir morcelé le parc pour n’en conserver que 5 hectares où se situent l’orangerie, la serre, le potager, la bergerie et les dépendances.

En 1986, Monsieur Laurent, ancien champion de motocross, rachète le château. Âgé de 65 ans à cette date, il se retrouve très vite dépassé et ruiné par la tâche à tel point que les huissiers viendront poser les scellés dans toutes les pièces du château.

C’est un jeune commissaire-priseur de la région, Arnaud Séguinet, qui en fera l’acquisition en 1994 dans le cadre d’une SCI, et entreprendra des gros travaux de rénovation d’électricité et de peinture. Mais quelques mauvaises années professionnelles consécutives le conduiront à revendre cette propriété quatre ans plus tard.

En 1998, la famille Navarro cherchait une maison entre Paris et Le Havre. Tombés sous le charme du Taillis, ils se sont lancés dans l’aventure pour sauver et restaurer ce monument historique en acceptant de très lourds sacrifices financiers. Ancien d’Air France, Monsieur Navarro pouvait rester sur place pour entreprendre les travaux d’urgence pendant que Madame Navarro se partage toujours à ce jour entre son cabinet d’avocat parisien et son château normand. Les Navarro décident d’ouvrir immédiatement le Taillis au public et leur jeune fils, Nicolas, passionné et plein d’énergie, se plonge aussi totalement dans cette aventure de restauration.

Les toitures ont subi une grosse révision dès 1998. Depuis, elles font l’objet d’un contrôle et d’un entretien régulier s’élevant à 3 000 euros par an. Cette année, la révision de trois couronnes de cheminées a nécessité un budget de 11 000 euros, subventionné à hauteur de 2 000 euros.

Pleins de courage et d’enthousiasme, les Navarro ne ménagent pas leur temps et leur efforts en effectuant eux-mêmes tous les travaux nécessaires pour préserver et redonner vie à leur domaine dont le parc et le jardin ont été classés dans les années 80, le château et tous les logis extérieurs en 1994. Depuis quelques années, Nicolas Navarro procède à la rénovation des différentes chambres en espérant pouvoir ouvrir au public de nouvelles parties de son château.

 

Musée Août 44 « l’enfer sur la Seine »

Poursuivant l’effort de ses parents, Nicolas Navarro, gestionnaire du château depuis quelques années, a créé au-dessus des anciennes écuries un musée thématique consacré aux évènements de la Seconde Guerre Mondiale et des combats qui ont suivi le débarquement en Normandie. Uniformes, armes, objets personnels de la vie courante de cette époque contribuent à la mise en scène des terribles affrontements qui ont abouti à la libération de la région.

En attendant l’aide de ses deux petits enfants, Nicolas Navarro peut s’appuyer sur une vingtaine de bénévoles et d’amis regroupés au sein d’une association culturelle et historique. Une aide précieuse qui lui permet de développer différentes activités (visites individuelles, groupes, séminaires, mariages, réceptions, visites aux bougies et animations diverses) pour contribuer à l’entretien de ce monument historique qui voit défiler entre 7 000 et 8 000 personnes chaque année.

 

POUR EN SAVOIR PLUS :

CHÂTEAU DU TAILLIS
Hameau de Saint-Paul
76480 Duclair
Ouvert du 1er mai au 15 octobre, du mercredi au dimanche de 10h à 12h et de 14h à 17 et toute l’année pour les groupes.
Tél. : 02 35 37 95 46 – 06 83 82 22 89
Site internet : www.château-du-taillis.com

 

PLAN D’ACCÈS :